Exaucer les vœux de patient(e)s en fin de vie

Plusieurs membres de l’équipe des soins palliatifs de l’HGJ (assis, de la gauche) : Areti Anastassopoulos, infirmière consultante; Kathia Dorcélus-Cétoute, infirmière-chef; et Dr Thomas de Gabory. (Debout, de la gauche) : Vivian Myron, travailleuse sociale; Marie-Laurence Fortin, infirmière consultante; et Dr Jean Zigby, chef du service des Soins palliatifs de l’HGJ.
Plusieurs membres de l’équipe des soins palliatifs de l’HGJ (assis, de la gauche) : Areti Anastassopoulos, infirmière consultante; Kathia Dorcélus-Cétoute, infirmière-chef; et Dr Thomas de Gabory. (Debout, de la gauche) : Vivian Myron, travailleuse sociale; Marie-Laurence Fortin, infirmière consultante; et Dr Jean Zigby, chef du service des Soins palliatifs de l’HGJ.

Sorties au restaurant, projections de films et célébrations de mariages à l’hôpital soulagent les personnes en soins palliatifs

L’infirmière-chef Kathia Dorcélus-Cétoute pose souvent aux patient(e)s de l’unité des soins palliatifs de l’HGJ une question simple, mais profonde. Si elle était un génie avec le pouvoir d’exaucer un dernier vœu, lequel serait-ce?

Tout comme la question, les réponses peuvent être simples, mais révélatrices. Un patient a demandé de passer ses derniers jours à l’hôpital avec son chat bien-aimé. Une autre voulait manger dans un grand restaurant à Montréal. D’autres ont demandé d’aller au cinéma ou de veiller à installer leurs enfants dans une maison meublée.

Travaillant discrètement et méthodiquement dans les coulisses, Mme Dorcélus-Cétoute et d’autres membres du personnel se sont donné pour tâche de réaliser ces rêves. Ces actes de générosité apportent aux patient(e)s confronté(e)s à leurs heures les plus difficiles une source de joie et de confort en fin de vie.

« Nous tenons à connaître les vœux de chacun. Certes, la maladie est là. Mais on traite la personne dans toutes ses sphères – le corps, l’esprit et l’âme. »

Kathia Dorcélus-Cétoute, infirmière-chef

Tous les jours, les équipes multidisciplinaires de l’Hôpital général juif et des établissements à l’échelle de notre CIUSSS cherchent à soulager la souffrance et à apporter un sens à la vie des personnes atteintes de maladies limitant l’espérance de vie. Exaucer les vœux personnels des patient(e)s est une façon de le faire.

Marion Le Blanc dans sa chambre à l’unité des soins palliatifs de l’HGJ, qu’elle a décorée avec des articles personnels.
Marion Le Blanc dans sa chambre à l’unité des soins palliatifs de l’HGJ, qu’elle a décorée avec des articles personnels.

Il y a quelques années, une patiente de 27 ans atteinte d’un cancer terminal a confié à Mme Dorcélus-Cétoute avoir toujours rêvé de manger au restaurant gastronomique Toqué! En réponse, l’équipe des soins a non seulement organisé un repas gratuit complet pour la patiente et son ami, mais a également veillé à habiller la patiente d’une robe en dentelle blanche – donnée par les Auxiliaires de l’HGJ – et à la faire maquiller par un professionnel. Le couple a aussi eu le droit à un transport en limousine.

« Ensuite, j’ai appris qu’elle avait toujours souhaité épouser son ami, mais qu’elle y avait renoncé en raison de sa maladie et que cette soirée était comme le mariage qu’elle n’a jamais eu », raconte Mme Dorcélus-Cétoute. La jeune femme s’est éteinte une semaine après.

Un autre cas a retenu l’attention de l’équipe des soins, soit celui d’une mère monoparentale en phase terminale préoccupée par le sort de ses trois enfants d’âge scolaire, qui devaient emménager avec elle dans un nouvel appartement. Elle savait qu’elle ne pourrait plus être là pour eux, mais elle serait rassurée de les savoir installer dans une maison remplie de jouets et de meubles. L’équipe des soins palliatifs a donc appelé IKEA pour leur raconter l’histoire de leur patiente. Le géant du meuble a généreusement offert meubles, literie, tapis, cadres et jouets pour la chambre des enfants. Mme Dorcélus-Cétoute et la conseillère-cadre en soins infirmiers Marie‑Laurence Fortin ont assemblé les meubles durant leurs heures libres et ont décoré l’appartement; les enfants y ont emménagé avec un membre de la famille après le décès de leur mère.

« Chaque cas est précieux. »

Kathia Dorcélus-Cétoute

Ces efforts illustrent que les soins palliatifs englobent bien plus que des services médicaux spécialisés. Une équipe composée de médecins, d’infirmier(ère)s, de travailleurs(euses) sociaux(les), de musicothérapeutes, de conseiller(ère)s en soins pastoraux et bien d’autres veillent aux besoins spirituels, émotifs et psychologiques des patient(e)s.

« Nous voyons avec les patient(e)s ce qui pourrait les soulager, même dans une situation impossible, explique le Dr Jean Zigby, chef du service des Soins palliatifs de l’HGJ.  Nous les laissons nous guider. »

Les patient(e)s ont déjà beaucoup souffert de leur maladie et de leurs traitements avant d’être admis(es) aux soins palliatifs et l’équipe devient, en quelque sorte, une famille pour eux, a-t-il expliqué.

« Il faut un village pour bien mourir », ajoute le Dr Jean Zigby, qui est également directeur de la Division des soins de support et des soins palliatifs du CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal.

« Il faut croire que l’amour qu’on apporte aux patient(e)s, à la fois par la science médicale et par les soins que nous leur prodiguons, va les guérir à la fin de leur vie. »

Dr Jean Zigby, chef du service des Soins palliatifs

Exaucer leurs vœux est un pas dans cette direction. « Certaines personnes peuvent vivre de très beaux moments jusqu’à leurs derniers jours ou leurs dernières heures, chose impossible sans les soins extraordinaires assurés par notre équipe, déclare le Dr Zigby. Ce sont les personnes les plus dévouées qui soient. »

Areti Anastassopoulos, infirmière consultante en soins palliatifs à l’HGJ, se souvient d’un patient atteint d’un cancer terminal qui rêvait d’aller en Grèce avant de mourir. Comme l’état de santé du patient l’empêchait de réaliser ce rêve, Mme Anastassopoulos a eu l’idée de lui rapporter de son séjour personnel en Grèce un sac rempli de sable ramassé sur une plage. Elle a versé le sable dans une bassine afin que le patient puisse y enfouir ses pieds.

« Il m’a dit, ‘je sens la chaleur du soleil de Grèce sur mes pieds’, se souvient Mme Anastassopoulos. C’était un très beau moment. »

À l’enterrement du patient, sa mère a versé le sable sur son cercueil.

En mars, une femme en soins palliatifs a confié à la travailleuse sociale Vivian Myron qu’elle était triste de partir avant de pouvoir assister au mariage de sa fille. Dans les heures qui ont suivi, Mme Myron a apporté des décorations et a organisé une cérémonie de mariage dans la chambre de la patiente. Celle-ci s’est éteinte le lendemain.

Mme Marion Le Blanc, femme de 68 ans, a aussi retenu l’attention de l’équipe. Mme Leblanc avoua être déprimée à son transfert à l’unité des soins palliatifs, en septembre. Puis, grâce aux gestes et actes de gentillesse du personnel, son attitude commença à changer. Un jour, elle mentionna aux infirmier(ère)s avoir envie d’un smoothie; le lendemain matin, on lui en apporta un de Second Cup. Puis, ce fut d’un brownie dont elle eut envie; elle en reçut un au petit‑déjeuner.

« On ne pourrait demander mieux comme personnel soignant. Toute l’équipe est à notre écoute et nous demande toujours ‘qu’est-ce qu’on peut faire pour vous’? »

Marion Le Blanc

« Il faut faire savoir que le personnel ici est spécial », a dit Mme Le Blanc le 2 octobre, lors d’une conversation avec les membres du Bulletin 360 tenue dans sa chambre, décorée d’articles et d’objets décoratifs apportés de chez elle. « Il faut dire combien ils sont gentils, et que c’est grâce à leur empathie et à leur compréhension que je me sens vivante. »

Mme Le Blanc s’est éteinte dix jours plus tard.

Ses derniers jours ont été apaisés par le personnel qui l’entourait à l’HGJ, qu’il s’agisse du personnel d’entretien ménager, des art-thérapeutes, des infirmier(ère)s ou des travailleurs(euses) sociaux(les). « Nous avons tous été la dernière personne à recueillir le dernier souffle d’un(e) patient(e), dit le Dr Zigby. C’est un lourd fardeau, mais aussi un honneur et un privilège. Il faut vraiment aimer soigner les gens pour le faire. »